Donation de 427 pièces de ma collection privée

Donation au nouveau musée Maya

Je viens d’offrir le meilleur de ma collection de textiles mayas du Chiapas et du Guatemala. Les textiles les plus remarquables seront présentés dans les vitrines du nouveau Musée Maya situé dans le fameux couvent de Santo Domingo à San Cristobal de las Casas, Chiapas, Mexique.

Textiles amérindiens

Trois raisons majeures ont présidé à la naissance de ma collection: la première m’a obligé à sauver un ensemble de costumes indigènes du Chiapas mexicain d’une irrémédiable dispersion et la deuxième est le fruit des remerciements reçus pour les dons faits aux associations de tisserandes ou à l’aide offerte aux familles que j’ai soutenu pendant les années de détresse qu’a traversé le Guatemala indigène. La troisième est due à ma curiosité et au désir de revisiter les fouilles clandestines faites par les pilleurs de tombes précolombiennes, milliers d’excavations  abandonnées au soleil des déserts de la côte péruvienne.

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Huipiles de l’atelier, Guatemala

Chef-d’oeuvres guatémaltèques

Le Guatemala a subi un génocide sans précédent lors de la dictature appuyée par les militaires. Les indigènes ont vécus les années les plus difficiles de leur histoire. A l’instar de Carolina de Guaran qui défendait courageusement les tisseuses de sa communauté d’Aguascalientes, les indiens des autres ethnies ont soufferts d’exactions impitoyables suivies de grandes difficultés matérielles. Avec l’appuis de Rigoberta Menchu qui venait de recevoir le prix Nobel de la paix et grâce au soutien financier de nombreux amis suisses, français et belges, j’ai pu intervenir auprès des indigènes avec lesquels je m’étais lié d’amitié au cours de mes fréquents voyages d’étude. En retour j’ai reçu en cadeaux de nombreux « huipiles » blouses, « sutes » carrés de brocard, ceintures et châles cérémoniels. Chacun de ces trésors est ce que l’Indien à de meilleur à offrir, a fortiori s’il a mis son existence ou sa santé en danger. Faire don d’un textile est l’assurance d’une prolongation de vie, même dans l’au-delà, c’est pourquoi tous les vêtements qu’il aura conservé seront déposés avec lui dans sa tombe.

Tous les costumes chapanèques

Les Mayas du Mexique et, plus particulièrement ceux du Chiapas, ont conservé leurs traditions ancestrales. Ils sont répartis en quelque soixante communautés. Chaque ethnie a été regroupée autour d’une église, ceci dès l’arrivée, au seizième siècle, des conquérants espagnols. Ainsi formés, tous les villages ont dû choisir leurs costumes afin d’être aisément différenciés les uns des autres. C’est pourquoi, aujourd’hui, toutes les communautés qui vivent entre 300 et 2.800 mètres se distinguent encore par leur vêtements, leurs brocards et leurs broderies.

En altitude, les tissus sont tissés de brins de laine provenant des ovidés importés depuis l’époque coloniale. En terre chaude, ils sont façonnés uniquement à partir de coton et leurs motifs ont toujours une signification symbolique et sacrée.

Il y a quelques années encore, toutes les techniques employées étaient traditionnelles. Par exemple, l’usage des teintures végétales et minérales était courant, l’emploi de la cochenille fréquent. Aujourd’hui, surtout pour des raisons économiques, l’indigène n’a plus la possibilité ni le temps de filer, de teindre, de tisser, de broder un vêtement dont la réalisation exige parfois jusqu’à huit mois de travail avant d’être achevé. On choisit des textiles modernes, des produits synthétiques, des teintures chimiques, des décors simplifiés. Un patrimoine, une tradition millénaire, un artisanat unique risquent d’être voués à la disparition ou à une radicale transformation. Trouver un pièce remontant à plus de vingt ans devient impossible, à plus forte raison quand on sait que l’indigène des Chiapas a, lui aussi, pour coutume d’être enterré avec tous les vêtements qu’il a porté au cours de son existence.

Joaquin Hernanz Humbrias est né en 1916. A la fin de la guerre civile d’Espagne, il est exilé au Mexique. Il s’installe à San Cristóbal de las Casas dès 1940 et c’est vers 1960 qu’il ouvre commerce dans la rue marchande et touristique de Guadalupe à l’enseigne de la « Segoviana ». Fixé au coeur de la zone indienne, il collectionne le plus beaux costumes et tissus indigènes des Chiapas. Il réunit, en 25 ans de troc, un ensemble unique sur les Mayas du Mexique et promet, ceci dès notre première rencontre en 1972, de ne jamais se défaire de sa précieuse collection.

Le 8 décembre 1988, il m’avoue avoir fait, en avril déjà, une promesse de vente à K. Tagami, marchand d’antiquités et d’objets ethnographiques à Nara, au Japon. Selon le courrier de ce dernier, il était clair que la collection serait ensuite revendue et dispersée. Cette promesse faisait suite à une alerte due à la santé de Joaquin. Il souffrait alors de problème au coeur et venait de faire une ambolie. Il me démontre par lettre, catalogue de photos, liste détaillée et confirmation de prix reçue le jour même du Japon qu’il est prêt à se séparer de 316 pièces.

Le 9 décembre, lui promettant de conserver la totalité de sa collection et lui rappelant nos liens antérieurs et mes antécédents anthropologiques, je lui fais une offre supérieure pour 369 pièces nouvellement cataloguées, soit 53 pièces supplémentaires.

Le 12 décembre, jour de la Vierge de Guadalupe, l’affaire est conclue; avant Noël toute la collection est en Suisse, dûment dédouanée.

Rien n’eut été possible sans l’intervention du groupe qui m’accompagnait lors de ce voyage que nous avions prévu dans un but social et caritatif. En effet, nous avions séjourné chez le père Michel Chanteau à San Pedro Chehalhó afin de l’aider dans ses projets d’entraide, plus particulièrement en le soutenant dans les travaux d’aménagement des eaux usées de la communauté et dans la constitution d’une pharmacie digne des soins qu’il prodiguait après des indigènes tzotzils. A notre retour à San Crostobál tous les participants du groupe m’ont aidé à trouver les fonds nécessaires au rachat de la collection. Nous avons désinfecter puis emballer l’ensemble dans neuf sacs géants de jute prévus pour le café. Mon chauffeur Mario chargea son vieux bus et le tout fut transféré à Mexicó avant d’être accepté gracieusement dans les soutes d’un avion d’Air France. A mon arrivée en Suisse, l’aide financière de Marino Faccini, directeur de Carlson Wagons-Lits fut renouvelée par celle de Jean-Claude Veillon, encore à la tête de son entreprise. Leurs soutiens précieux m’ont permis de rembourser les prêts de mes « aficionados », de conserver puis de restaurer les plus belles pièces de laine de la collection, particulièrement celles qui avaient souffert des mites, auprès des spécialistes de la Fondation Werner et Margaret Abegg à Riggisberg. Je me suis promis, dès lors, qu’elle serait mise en valeur au profit des Indiens du Chiapas et qu’elle serait un témoignage de leur patrimoine sacré et de leur prestigieux passé, histoire inscrite par le fil, support des symboles de leur mythologie tissée par la couleur et les signes que chaque tisseuse avait su reproduire et transmettre de mémoire depuis des générations.

Echantillons de l’ancien Pérou

Depuis les années 80 j’ai fait de très nombreux périples le long des côtes désertiques du Pacifique péruvien. C’est ainsi que j’ai parcouru des dizaines de nécropoles seul, mais aussi en compagnie de Maria Reiche, qui m’a fait découvrir ses pistes de Nasca ou avec l’éminent archéologue Federico Kauffmann Doig avec qui j’échangeais des commentaires sur les civilisations Moche, Chacay, Nasca ou Chimor et que nous comparions avec mes connaissances des Mayas ou des Aztèques.

Au Pérou les tombes précolombiennes se comptent par millions. Elles sont disposées aux abords désertiques des vallées irriguées qui descendent directement des Andes qui, par la fonte des neiges offrent la vie aux habitants d’une Côte de quelque 2.000 kilomètres où jamais il ne pleut. Pour survivre dans l’au-delà, les Amérindiens furent momifiés et enterrés avec tout un fardeau funéraire. Accompagnés d’offrandes, entourés de céramiques sacrées, emballés de tissus et de vêtements richement décorés, porteurs de bijoux, de masques et de décors faits d’or ou d’argent, les morts étaient plus riches que les vivants. Les fouilleurs clandestins, souvent de simples paysans, ne se sont jamais privés de recueillir ces richesses. Il ne reste que les milliers de trous béants qui font ressembler ces nécropoles à des champs de bombardement. En y flânant, j’y ai recueilli des dizaines de témoignages, parfois sous forme de simples échantillons oubliés sur le sable et parmi les ossements abandonnés, de ce que nous ont laissé les tisserands les plus remarquables du monde. Ces exemples modestes sont la preuve visible d’un univers extraordinaire transcrit à l’aide de motifs et de signes qui n’ont pu être conçu que par les visions et les introspections qui font suite à l’ingestion de psychotropes. Le textile devient ainsi, par son fil, un conduit mental et physique, ce support étant ainsi le porteur et le témoin vivant de toute la cosmovision indigène.

Visitez également le deuxième site de Maurice-Eric Hefti - Cliquez : Ethnorésilience.com

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